jeudi 18 décembre 2008

Interview d'Edu Falaschi pour Musica Expressa




Edu Falaschi a accordé une longue interview pour Musica Expressa, dans laquelle il retrace toute sa carrière, de Mitrium à Almah !
Voici une traduction de l'interview, bonne lecture à tous !

"Avec les travaux d’Angra et, plus récemment ceux d’Almah, le chanteur Edu Falaschi est sous les feux de la rampe. Toutefois, sa carrière est bien antérieur à tout ceci et est passée par d’autres moments importants de la scène heavy metal brésilienne. Presque une décennie avant d’être appelé pour remplacer André Matos, Edu participe au concours mondial pour remplacer le chanteur Bruce Dickinson de Iron Maiden en 1994. En outre, il impose sa présence au niveau national avec les groupes Mitrium et Symbols, dont les albums ont obtenus des ventes significatives à l’intérieur comme à l’extérieur du Brésil. Dans une interview exclusive accordée juste après la concert d’Almah à Fortaleza, le 5 décembre, Edu nous rappelle son parcours dans ces groupes, raconte son entrée dans Angra, nous décrit son travail de composition et met en lumière l’importance de l’union au sein de la scène heavy métal au Brésil, laquelle selon lui, est plus forte au Nord-est qu’au Sud-est, qui est pourtant son point d’ancrage habituel

Musica Expressa : Tu as commencé à jouer à l’âge de 14 ans, tu es issu d’une famille de musiciens, mais tu n’avais pas de goût particulier pour le chant. A quel moment as-tu découvert que tu voulais être chanteur ?

Edu Falaschi : Je jouais dans une groupe de reprises, et le groupe avait un autre chanteur, je jouais de la guitare et je faisais les chœurs. Le chanteur est parti du groupe et ils m’ont dit : « chante pendant les répétitions puisque nous n’avons plus de chanteur pour l’instant ». C’est ce que j’ai fait et ils m’ont dit : « Wow, tu chantes bien ! On va faire la chose suivante, tu arrêtes de jouer de la guitare, tu chantes seulement, on va prendre un autre guitariste » ; j’ai commencé à chanter et aussitôt je me suis découvert en tant que chanteur.

Musica Expressa : Et pourquoi tu ne chantais pas avant ? Tu avais honte, tu trouvais que tu ne savais pas ?

Edu Falaschi : Non, je n’avais pas encore découvert, tu comprend ? Je trouvais ça sympa de chanter, mais ce n’était pas une chose qui m’attirait. Je trouvais ça bien mais je préférai jouer (de la guitare). J’ai ensuite commencé à me passionner.


Mitrium

Musica Expressa : Tu es entré dans Mitrium en 1990, et, en 1994, tu as laissé le groupe pour entrer en fac de pub. Comment s’est prise cette décision de donner la priorité aux études plutôt qu’à la musique?

Edu Falaschi : le fait est que quand tu es adolescent, tout le monde te met la pression pour que tu étudies. La musique est un marché compliqué, en particulier pour le heavy métal ici au Brésil, et toute ma famille me disait : « tu devrais faire des études ». Alors j’ai été étudier, la publicité et le marketing, c’était ce que j’aimais en dehors de la musique, je trouvais ça intéressant. J’ai terminé mon cursus universitaire, mais en vérité, je n’ai jamais travaillé dans cette branche. J’ai toujours fait de la musique, la musique est dans ma vie depuis mes 12 ans.

Musica Expressa : Tu te verrais exercer dans la pub ?

Edu Falaschi : Non, non ! Cela m’ai aidé pour mon « marketing » personnel, mais travailler dans une agence non, cela n’a rien à voir avec moi.

Symbols

Musica Expressa : Ton premier contact professionnel avec le groupe Symbols a été en tant que producteur, Tito Falaschi, ton frère en était le chanteur. Comment s’est passée cette influence familiale dans ta formation musicale ?

Edu Falaschi : En fait, c’est moi qui ait influencé mon frère, parce que je suis le plus vieux, je voulais toujours lui apprendre des choses, et je l’ai donc influencé. Il m’a appelé pour produire l’album parce que j’avais des facilités pour l’arrangement, je jouais de plusieurs instruments et j’avais donc des facilités pour la composition. Mon frère m’a dit : « Viens produire notre groupe, nous avons besoin d’un coup de main. Je l’ai produit, et en fin de compte il m’a dit : « chante un morceau », j’ai chanté, « chante deux morceaux », ce que j’ai fait …et là il a eu une idée : « Pourquoi ne pas nous unir, puisque tu n’as pas de groupe ? Nous partagerons les vocaux » et j’ai répondu « bonne idée », et j’ai rejoins le groupe.

Musica Expressa : Tu es sorti de Symbols quand tu as été engagé dans Angra, alors que Symbols enregistrait son troisième album. Comment s’est fait cette transition, sortir d’un groupe qui enregistrait un album et devoir enregistrer avec Angra dans la même année ?

Edu Falaschi : Cela a été un peu le bordel parce que les gars de Symbols ont été un peu pris de cours. Mais en vérité, Symbols était déjà très divisé, parce que mon frère (Tito) était déjà parti, (Rodrigo) Arjonas, qui était l’autre guitariste – avec Damian (Tiguez) - était lui aussi parti – le clavier était parti aussi, il restait en fait, moi, le batteur et Demian. Nous étions déjà un peu affaiblis, si bien que quand est arrivée l’offre d’Angra, je ne pouvais la refuser. Alors j’ai parlé aux gars de Symbols : « nous allons continuer, je vais faire Angra en premier, et quand j’aurai à nouveau du temps, je ferai à nouveau Symbols. Et ils n’ont pas voulu : « non, nous ne voulons, nous allons passer au second plan, nous ne voulons pas… »Ils ont fait leur choix et Demain a commencé à chanter…C’est dommage, cela aurait été cool si nous avions enregistré un album de plus avec Symbols. Mais je suis convaincu que les choses arrivent quand elles doivent arriver …

Angra

Musica Expressa : Tu étais déjà compositeur à cette époque. Et quand tu es entré dans Angra, un groupe renommé, qui avait déjà une histoire, tu as enregistré des morceaux pour le premier album. Qu’est-ce que tu as ressenti en composant pour un groupe qui avait déjà fait son succès, qui avait déjà un public ?

Edu Falaschi : cela a été très agréable d’être reconnu par Kiko (Loureiro) et Raphaël (Bittencourt) pour mon travail, ils m’ont donné cette occasion et cette liberté : Le premier morceau de l’album est un des miens. Ca a été cool, j’ai été très heureux, j’ai été flatté de les entendre dire : « Wow, tes morceaux sont très bons, nous les utiliserons, mais le disque est déjà presque prêt », ils m’ont dit, « mais Nova Era, on ne peut passer à côté, « Heroes Of Sand », on ne peut passer à côté, nous allons les utiliser ». J’ai commencé dans Angra avec ces deux morceaux, et à partir de là, ma place a toujours augmenté de plus en plus. Et, par hasard, tous les premiers morceaux des albums d’Angra sont des morceaux à moi, ou des morceaux que j’ai écris en partenariat avec d’autres compositeurs, que ce soit Kiko ou Raphaël – La plupart avec Kiko en fait. Ces morceaux, « Nova Era » le premier de « Rebirth », « Spread Your Fire », le premier de « Temple Of shadows », et « The Course Of Nature », le premier de « Aurora Consurgens ». C’est trop fun, dans les trois albums, les premiers morceaux sont de moi, entre autres morceaux que j’ai aussi composé pour Angra.

Musica Expressa : Et comment se passe le processus de composition ? Toi qui vis dans cette course de shows, tu es arrivé à faire avec Angra presque 100 shows dans l’année … Quand composes-tu ?

Edu Falaschi : Je compose en règle générale en dehors des tournées, quand je suis dans une période sédentaire. Quand je passe un temps à la maison, ou je vais à ma maison au bord de la mer, je suis là, avec toute ma famille, tranquille, et je commence à composer plus. Mais quelque fois il m’arrive d’être comme je suis ici, par exemple, avec toi en train de te parler, et juste après avoir terminé l’interview, je vais dans la loge, je prends une guitare et soudain j’ai une idée, alors je garde cette idée pour ensuite la développer plus tard.

Musica Expressa : Et comment se passe le partenariat avec Kiko et Raphaël ?

Edu Falaschi : tout naturellement. Je montre mes morceaux à Kiko, à Raphaël, ils les écoutent. S’ils sont intéressés, pensent que le morceau a un véritable potentiel, mais ils me montrent aussi les leurs, et j’en discute aussi, je donne mon avis, si je trouve ça bien, si soudain j’en trouve un bon, on se dit « nous n’allons pas faire celui –là, nous allons en faire un autre ». Il y a cette liberté, les gens se parlent. Et à partir de là, quand un morceau a été accepté, on commence à travailler ensemble. En règle générale, je viens avec des morceaux composés de la manière suivante : introduction, la voix principale, le couplet, le pont et le refrain. En général, j’ai un peu plus de mal à composer la partie instrumentale, parce que je ne suis pas instrumentiste dans le groupe. Et en dépit du fait que je joue de plusieurs instruments, je n’ai pas à discuter avec Kiko sur la manière de jouer de la guitare, non ? Parfois, je viens avec une idée originale : « Et Kiko, il y a une ligne de guitare que je verrai ainsi », et je lui chante. Il dit « Ah, partons de cette idée », il me montre, on joint nos idées pour travailler.

Musica Expressa :Il y a quelques temps, une lettre qui t’a été attribuée a circulé sur Internet, cela parlait des polémiques qu’ils y avaient au début du groupe, de la comparaison avec Andre Matos, et de quelques mensonges à propos de ta personne. Cette lettre est vraie ?

Edu Falaschi : Quelle lettre ?

Musica Expressa : C’était sur Orkut, il y a déjà un bon moment. Tu parlais d’un DVD qui avait été diffusé au moment où tu avais tes problèmes de voix …

Edu Falaschi : Ah, ça ! Celle là est de moi. Si c’est celle à laquelle je pense, oui. (Rires)

Musica Expressa : Et comment a été cette période ?

Edu Falaschi : Ca a été un très mauvais moment, c’était un moment où j’étais très malade, et de nombreuses personnes mauvaises en profitent. Puis, au fil du temps j’ai appris qu’il n’y a pas de limite, il a des personnes vraiment mauvaises, et avec Internet, elles le sont encore plus. Je suis un gars très sensible, et j’ai fini par être blessé à l’époque. Mais je me suis dit : « Mec, ça ne sert à rien. Je suis triste, mais il y a une seule chose à faire, c’est de m’améliorer et de chanter bien à nouveau ». Parce que je chantais vraiment très mal. Et les gens pensaient que j’étais calme, heureux ? Non, j’étais triste, j’allais vraiment mal. Je me suis dit : » Comment puis-je continuer à chanter ainsi ? Je ne peux pas continuer comme ça. Je ne suis pas ça » ; j’ai commencé à étudier, j’ai fait beaucoup de traitements et dieu merci, j’ai tout fait pour que tout redevienne bien à nouveau.

Musica Expressa : Edu, dans ton parcours musical, tu donnais déjà des cours de chant depuis 1999, et encore aujourd’hui, tu trouves toujours le temps pour donner des workshops. Quelle est ta relation avec l’enseignement de la musique, avec le fait de passer ton savoir aux autres ?

Edu Falaschi : Je trouve que c’est important, pour motiver de nouveaux musiciens, leur montrer qu’ils peuvent croire en leurs rêves, mais toujours en se basant sur des techniques et une bonne éducation, pour que le gars ne se fassent pas mal à l’avenir. Ca n’empêchera pas complètement, même en ayant de la technique, tu peux te nuire, ce qui a été mon cas. Et le cas de bien d’autres chanteurs comme Elton John, Pavarotti lui-même, Freddie Mercury (Queen), entre autres chanteurs qui ont eu des problèmes de cordes vocales. Beaucoup en réalité, on peut en faire une liste de deux cents …David Coverdale (ex Deep Purple, Whitesnake) … Et tous sont de grands chanteurs : Bruce Dickinson (ex Samson, Iron Maiden), James lui-même, Labrie de Dream Theater, Michael Kiske (ex Helloween) en ont eu aussi … La majorité des chanteurs a déjà eu ce type de problèmes. Malgré beaucoup de technique, cela arrive. Mais il faut avoir de la patience, les cordes vocales sont bien délicates.

Almah

Musica Expressa :Et comme Angra est pour le moment arrêté, tu fais des workshops, des participations spéciales … C’est dans contexte qu’est né Almah, ton projet parallèle ?Quand as-tu sentis que c’était le moment d’avoir un tel projet ?

Edu Falaschi : Ah, je l’ai senti dans la minute où Angra a décidé de s’arrêter, en juillet 2007. Je me sui dit : « Ok, et puis, qu’est-ce que je dois faire ? Rester à la maison ? » . Almah était déjà créé, beaucoup de gens connaissaient mon projet. J’ai donc décidé de le transformer en un véritable groupe parce que c’est plus facile pour travailler. Je crois plus dans les personnes qui travaillent ensembles, dans une bonne entente, tout le monde apportant ses idées, plutôt que juste moi et moi : « Et les gars, je vais tout dominer, je vais tout faire, et c’est comme ça » ; je pourrai le faire, mais je trouve que le résultat final est bien meilleur dans un groupe. La preuve en est avec « Fragile Equality » ; qui est à mon avis, un putain d’album, très bon. Et j’ai la certitude que sans ces gars là, qui se consacrent à ce groupe en tant que membres, l’album n’aurait pas été la moitié de ce qu’il est.

Musica Expressa : Pour le premier album, tu as appelé beaucoup de musiciens étrangers : Emppu (Vuorinen, Nightwish), Lauri (Porra, Stratovarius), l’ensemble de l’équipe en fait. Et tu as dit à Roadie Crew, que tu avais envie d’expérimenter le travail avec des gens d’autres cultures…

Edu Falaschi : Oui, je n’avais jamais enregistré avec des étrangers, et j’ai été heureux de la faire à cette occasion.

Musica expressa : Et ces différentes cultures ont influencées la composition ?

Edu Falaschi : Tout d’abord, je voulais faire appel à des amis. Je ne voulais pas faire appelle à des musiciens seulement parce qu’ils sont connus, les payer, et qu’ils n’aient aucun type d’engagement. Alors j’ai appelé des amis qui ont joué avec moi pendant les tournées d’Angra … Emppu de Nightwish est un ami, un grand ami. Nous sommes proches, il est déjà venu au Brésil, (…). Avec Nightwish, (qui est venu au pays pour la tournée « Brazilian Passion Play"), Il était à Sao Paulo, je suis allé le voir et je l’ai engagé ; c’est un gars très gentil. Là (à l’époque à laquelle on montait l’équipe d’Almah), il a dit : « eh, Lauri vit en Finlande aussi, de « Stratovarius », va –ton le faire avec lui ? » et j’ai répondu : « Bien sûr ! Je connais Lauri aussi ! ». Enfin j’ai appelé Casey Grillo, de Kamelot, qui est un de mes amis aussi. Et tout a été bien. Ca a été parfait parce que j’ai eu 3 merveilleux gars pour mon album, ainsi que d’autres grands invités.

Musica Expressa : Pendant le concert (à Fortaleza) tu as dit que le Nord-est était un endroit intéressant pour jouer. Quelle est ta perception de la scène d’ici, du Nord –Est et de la scène Brésilienne ?

Edu falaschi : Le Nord-Est, est je pense, de nos jours, la place forte du heavy métal, et ce, avec Sao Paulo, qui en a toujours été le pôle principal. Je pense que la scène heavy métal s’est beaucoup affaiblie ces trois dernières années, mais elle se maintient encore ferme et fort dans le nord-est.

Musica Expressa : Et à quoi attribues –tu cette chute ?

Edu Falaschi : je pense que l’arrêt d’Angra a eu une grande importance, Sepultura aussi a eu des problèmes, la fin de Shaman et son remaniement– celui de Confessori-, en fait, tout ça. Je pense que les groupes devraient perdurer et être de plus en plus forts. Les personnes qui luttent pour que les groupes soient de plus en plus faibles et splittent, je ne comprends pas. Aucun groupe n’est resté stable, il y a Hangar, André Matos en solo, Almah, qui étaient déjà connus. Dr Sin, Korzus, Torture Squad sont apparus, mais se sont tous divisés – d’un groupe sont apparus trois, quatre, cinq groupes … D’Angra est apparu Shaman et le nouvel Angra, le nouveau Shaman, André Matos, Hangar, Almah … Il y a eu beaucoup de divisions et de forces perdues. Si les groupes s’étaient unis, peut-être que cela n’aurait pas été le cas, peut-être que cela aurait été cool, mais les groupes ne se sont pas unis, non ? Chacun est parti de son côté, disant des bêtises les uns sur les autres dans les interviews. Je pense que c’est la principale raison de l’affaiblissement de la scène (heavy métal)."

Vous pouvez retouver l'interview d'Edu en portugais sur le blog Musica Expressa et sur le site Whiplash